Être soi-même

       – Le point de vue des artistes

 


Présentation



Je suis seul à être moi-même. Quelle responsabilité.

Vladimir Volkoff 


Il n’est pas prouvé que notre époque soit mauvaise pour l’Esprit. Beaucoup s’en contentent, d’autres ne la vitupèrent que pour mieux en user. Se plaindre d’elle est juvénile (vingt ans est l’âge des incipits définitifs, on le sait). Vouloir la changer en Paradis est déjà sénescence. En revanche, il est possible à chacun de s’éduquer. Cela demande un investissement dans l’optimisme et de réelles qualités. Il s’agir de bâtir entre soi et le monde des phrases-remparts. Et de suivre leur ligne de conduite comme la sentinelle fait sa ronde.

Nous naissons urbains, mais la société n’est pas tout l’horizon. Il s’agit d’aller plus loin, d’être soi-même – de s’obtenir. L’âme seule a l’altitude suffisante pour que nos aspirations deviennent une vraie respiration, "à pleins poumons".

Nous naissons des autres, vivons par soi. Nous sommes urbains, mourons humains. 
 

Denis Boissier

(juin 2009)




 "L'Homme de Vitruve" par Léonard de Vinci, vers 1490.




                               Choix de citations d’artistes

                  sur la difficulté d’être soi-même



ALAIN (1868-1951)

La morale consiste à se savoir esprit et, à ce titre, obligé absolument ; car noblesse oblige. Il n’y a rien d’autre dans la morale que le sentiment de la dignité. 

   

                ALBALAT Antoine (1856-1935)

Un livre qu’on quitte sans en avoir extrait quelque chose est un livre qu’on n’a pas lu. 


ANCIEN TESTAMENT

Mon cœur trouve sa joie dans mon travail ; c’est le fruit que j’en retire.


               BARRES Maurice (1862-1923)

Cette manie moderne de donner une façon commune à tous les esprits et de briser l’individu. 


BAUDELAIRE  Charles (1821-1867)

La vertu dangereuse, c’est un esprit plus sensible, plus élevé ou plus délicat que le commun des confrères, des camarades, de la foule enfin. Le vice encore plus dangereux, c’est la lâcheté, le découragement, et l’habitude de laisser fuir les années, en renvoyant toujours les choses au lendemain. […] Quand on a déjà contre soi une supériorité d’esprit, il faut être d’autant plus patient, plus obstiné, plus assidu. Je possède parfaitement la science de la vie ; mais je n’ai pas la force de la mettre en pratique. Comprends-tu maintenant pourquoi l’on voit tant d’auteurs plus que médiocres si bien réussir et gagner tant d’argent ? Ils ont tout pour eux, leur médiocrité d’abord, et ensuite toutes les chances que donne l’assiduité.

Défions-nous du peuple, du bon sens, du cœur, de l’inspiration, et de l’évidence. 


               BENDA  Julien (1867-1956)

Tout un monde moderne adopte la hiérarchie de valeurs exactement contraire, et c’est sa définition. 

Ne soyez pas de votre génération. Ne dites : "Nous, les jeunes". Fuyez leurs associations, qui ne visent qu’à la domination temporelle. Rappelez-vous qu’en matière de pensée l’union fait la faiblesse. N’aimez pas votre temps, parce que c’est le vôtre. Essayez de le juger comme si vous étiez en l’an 3000. […] Dites-vous que la plupart des choses qui s’impriment, voire les plus acclamées, sont dénuées de vraie valeur et qu’on n’en parlera plus dans dix ans. Dites-vous que toutes les époques veulent avoir de grands hommes et que la plupart, n’en ayant pas, les inventent.   

On ne passe pas impunément plusieurs heures à entendre des gentillesses automatiques, des cruautés gratuites, des clichés politiques dépourvus de toute critique, des engouements de commande, des commérages, des bons mots tenus pour des raisons. 

La raison est essentiellement révolutionnaire parce qu’elle est universelle, alors que l’ordre social, lui, est toujours intéressé. 


                   BERGIER Jacques (1912-1978)

L’intelligence, c’est ce qui fait que l’on s’abstient de conclure. 


BERNANOS Georges (1888-1948)

Notre règle n’est pas un refuge. Ce n’est pas la règle qui nous garde, c’est nous qui gardons la règle. 

La plus haute forme de l’espérance est le désespoir surmonté.



               

                                                    BILLY André (1882-1971)

[La génération nouvelle] se rendra-t-elle compte assez tôt que si le mépris des Anciens est excusable, parfois charmant, et, dans une certaine mesure, nécessaire chez les jeunes gens, il contient en germe un affaiblissement précoce ? 


          BLUM Léon (1872-1950)

Trouver du bonheur à l’admiration de la foule serait perdre l’estime de soi qui est la condition première du bonheur. 

La foi religieuse dans le travail, la fierté d’écrire, la vertu d’une conscience difficile… le ton perdu des moralistes : classicisme, optimisme et jansénisme. 

Contre le développement libre de l’individu, ce n’est pas la contrainte ou la misère que je redoute le plus, mais les liens de l’affection partagée et du bonheur médiocre. 


                       BORGES Jorge-Luis (1899-1986)

On finit toujours par ressembler à ses ennemis. 


                BRETON André (1896-1966)

Je m’efforce, par rapport aux autres hommes, de savoir en quoi consiste, sinon à quoi tient ma différenciation. N’est-ce pas dans la mesure exacte où je prendrai conscience de cette différenciation que je me révèlerai  ce qu’entre tous les autres je suis venu faire en ce monde et quel message unique je suis porteur pour ne pouvoir répondre de son sort que sur ma tête ? 


               CAILLOIS Roger (1913-1978)

Il n’y a pas d’efforts inutiles. Sisyphe se faisait les muscles. 


              CALAFERTE Louis (1928-1994)

La liberté, c’est de s’être identifié. 


              CARLYLE Thomas (1795-1881)

La véritable université, à cette époque-ci, c’est une collection de livres. 


        CAMUS Albert (1913-1960)

Dans un monde de la condamnation à mort qui est le nôtre, les artistes témoignent pour ce qui dans l’homme refuse de mourir. 

On me loue, je rêve un peu, on m’offense, je m’étonne à peine. 

J’ai mis dix ans à conquérir ce qui me paraît sans prix : un cœur sans amertume. 

Ascèse non sur le désir qu’il faut garder intact, mais sur sa satisfaction. 

L’aristocratie n’est pas d’abord la jouissance de certains droits, mais d’abord l’acceptation de certains devoirs qui, seuls, légitiment les droits. L’aristocratie, c’est à la fois s’affirmer et s’effacer. 

Tout accomplissement est une servitude. Il oblige à un accomplissement plus haut. 


            CHAMFORT Nicolas de (1740-1794)

Presque tous les hommes sont esclaves, par la raison que les Spartiates donnaient de la servitude des Perses, faute de savoir prononcer la syllabe : NON. 


            CIORAN Emil Michel (1911-1995)

Proverbe chinois : « Quand un seul chien se met à aboyer à une ombre, dix mille chiens en font une réalité. » A mettre en épigraphe à tout commentaire sur les idéologies. 


CLAUDEL Paul (1868-1955)

Ce n’est pas le temps qui manque. C’est nous qui lui manquons. 


COCTEAU Jean (1889-1963)

La critique compare toujours. L’incomparable lui échappe. 

Qui s’affecte d’une insulte, s’infecte. 

  

             COMTE-SPONVILLE André (né en 1952)

On l’a dit cent fois : "la mode, c’est ce qui se démode", et la modernité n’est pas autre chose, en art, que la dernière mode, érigée en esthétique. […]  Qu’on ait pu en faire une valeur positive, et la valeur, dit assez le malheur du temps, et le peu qu’il avait à dire. 


  CORNEILLE Pierre (1604-1686)

Faites votre devoir, et laissez faire aux dieux. 


DEVISES

Rien de trop – En tout la mesure (Précepte du temple de Delphes) 

Hâte-toi lentement (Festina lente) (Proverbe latin) 

Travailler, c’est prier.  (Devise des moines bénédictins) 

             

                        DRIEU LA ROCHELLE Pierre (1893-1945)

L’art, en donnant du prix aux sensations, offre aux hommes leur seule chance de réaliser la vie.


                 DUHAMEL Georges (1884-1966)

Le mot lecture veut dire choix…Quand nous lisons un livre, une revue, un journal, nous choisissons la substance de notre âme. 


                       DUMAY  Raymond (1916-1999)

Nous vivons dans une dictature de la médiocrité tempérée par le talent. 


            ELUARD Paul (1895-1952)

Il y a un autre monde, mais il se trouve dans celui-ci. 


                         EMMANUEL Pierre (1916-1984)

Je meurs sans cesse aux choses que j’espère. 


               EPICTETE (50-125 ou 130)

Accuser les autres de ses malheurs est le fait d’un ignorant. S’en prendre à soi-même est d’un homme qui commence à comprendre. N’en accuser ni un autre ni soi-même est d’un homme accompli. 

Les choses contre lesquelles nous ne pouvons rien, faisons en sorte qu’elles ne puissent rien contre nous. 

Quoi que ce soit qu’il m’arrive, il dépend de moi d’en tirer avantage. 

La liberté n’a qu’un chemin : le dédain des choses qui ne dépendent pas de soi. 


                          FLAUBERT Gustave (1821-1880)

Tout le rêve de la démocratie est d’élever le prolétaire au niveau de bêtise du bourgeois. Le rêve est en parti accompli. 

J’appelle bourgeois quiconque pense bassement. 

Pour se faire estimer, il ne faut montrer que les côtés les plus laids : c’est le moyen d’être au niveau commun. 

Il s’agit de regarder tout ce que l’on veut exprimer assez longtemps et avec assez d’attention pour en découvrir un aspect qui n’ait été vu ou dit par personne. […] Il y a dans tout de l’inexploré, parce que nous sommes habitués à ne nous servir de nos yeux qu’avec le souvenir de ce qu’on a pensé avant nous sur ce que nous contemplons. La moindre chose contient de l’inconnu. Trouvons-le.  


                    GERALDY Paul (1885-1983)

Travailler, c’est marcher vers soi-même. Atteins-toi ! 


                                            GIDE André (1869-1951)

Le plus grand nombre des phrases dont nous nous servons pour exprimer nos émotions sont comparables à des chèques sans provision. 

Ne désespère pas dès que tu perds des yeux le but. Persuade-toi que le chef-d’œuvre ne s’obtient pas par une poursuite directe ; il y faut de la ruse, et de la patience dans le biais. Il faut l’aborder de partout. Ne t’achoppe pas sur un point, passe outre ; redis-toi que le nœud n’est qu’en ton esprit ; plus tu tires dessus, plus il se serre ; il se défait tout seul si tu le laisses un peu reposer. 

Il ne faut pas que l’admiration soit paresseuse. 

Persuade-toi que la louange relâche, qu’elle invite à un moindre effort, et que l’attaque bien supportée fortifie. 

Les choses les plus belles sont celles que souffle la folie et qu’écrit la raison. Il faut demeurer entre les deux, tout près de la folie quand on rêve, tout près de la raison quand on écrit. 

Si c’est le succès que tu cherches, persuade-toi que tout progrès que tu feras le compromet. Le gros public n’applaudit jamais qu’à ce qu’il peut reconnaître ; quoi que ce soit que tu lui apportes de neuf, il est gêné. 

Il ne me paraît pas bien séant ni bien adroit pour un artiste d’expliquer son œuvre ; d’abord, parce qu’il la limite du même coup, et que, lorsque cette œuvre est profondément sincère, elle déborde la signification que l’auteur lui-même en peut donner ; et puis je tiens que la meilleure explication d’une œuvre ce doit être l’œuvre suivante. 

Tel, qui ne voit ici qu’une serrure, verrait le monde entier au travers s’il savait seulement se pencher. 

               

            GIRAUDOUX Jean  (1882-1944)

Le vers, pour un poète, c’est le travail. L’inspiration est à l’usage des bourgeois. 

La volupté esthétique de la bourgeoisie, qui est le ruminement. 


            GŒTHE Wolfgang (1749-1832)

Quand nous nous manquons à nous-mêmes, tout nous manque. 

Toute œuvre d’opposition est une œuvre négative, et la négation, c’est le néant. Il ne faut pas renverser, il faut bâtir.


             GOURMONT Remy de (1858-1915)

Sincérité ne veut pas dire candeur, ni simplicité ne veut dire gaucherie. On est sincère, non parce qu’on avoue toute sa pensée, mais parce qu’on pense tout son aveu ; et l’on est simple parce qu’on a étudié son art jusqu’en ses derniers secrets et que de ces secrets on se sert sans effort avec une inconsciente maîtrise. 


                                                                        GUEHENNO Jean (1890-1978)

Qui est né chandelle, à l’heure de voter, pensera toujours que quarante chandelles valent mieux qu’un phare. 

                GUITTON Jean (1901-1999)


Il ne s’agit pas de faire un plan, mais de déterminer un axe, ce qui est tout autre chose. L’axe est un plan de vie. 

Attendre l’inspiration est une opération vaine. Le devoir est de prendre de la matière et de se salir les mains. 

Tu pourras ce que tu veux, si tu le veux avec art et longuement. 

Tout retard dans un travail d’esprit bien entrepris est la chance d’un fruit mûr. 

Il faut renoncer aux règles, si l’on veut atteindre au savoureux de son art. Mais cet écart suppose qu’on les possède, puisqu’on les outrepasse. 


                          GUITRY Sacha (1885-1957)

Quand on travaille dans la joie, dans l’enthousiasme, on n’a droit à rien. On n’a même pas droit au succès. On est payé d’avance. 

               GUTH Paul (1910-1997)

La bourgeoisie omnipotente voudrait que la littérature servît l’ordre social et entretînt des plates-bandes d’illusions autour de la réalité, comme les jardiniers ornent ses châteaux. Si le jardinier arrache les fleurs, elle le congédie. 


                     HESSE Hermann (1877-1962)


Même s’il doit beaucoup douter de lui-même et s’il ressent l’affreuse étroitesse de son talent et de ses possibilités, chaque artiste a sa signification et sa tâche particulière et, s’il demeure fidèle à lui-même, accomplit quelque chose que lui seul peut donner. 

Je constatai que, sur le plan intellectuel, vivre uniquement dans le présent, la nouveauté, était intolérable et aberrant, qu’une relation constante avec le passé, l’histoire des choses anciennes, permettait seule une vraie vie intellectuelle. 

Quand nous haïssons un homme, nous haïssons dans son image quelque chose qui réside en nous. Ce que nous ne portons pas en nous ne peut nous toucher. 

Celui qui a vraiment le désir de trouver ne doit embrasser aucune doctrine. 


HOLMES Sherlock

L’effet réciproque des idées et l’usage oblique de la culture présentent fréquemment un intérêt extraordinaire. 


     HUGO Victor (1802-1885)


Etre de cette majorité ! Préférer la consigne à la conscience ! Non ! 

Que le puits soit profond, mais que l’eau reste claire. 

La popularité ? C’est la gloire en gros sous. 

Il y a des gens qui ont une bibliothèque comme les eunuques ont un harem. 

Toute faute qu’on fait est un cachot qu’on s’ouvre. 

Solitaire-solidaire. 


        IBSEN Henrik (1828-1906)

L’essentiel est d’être sincère et vrai vis-à-vis de soi-même. Il ne s’agit pas de vouloir ceci ou cela, mais de vouloir ce qu’on doit absolument vouloir, parce qu’on est soi, et qu’on ne peut faire autrement. Tout le reste ne conduit qu’au mensonge. 


        JACOB Max (1876-1944)

Souvenez-vous à jamais de cette parole : « Au début de toute carrière, il y a un miracle de travail. » Et le travail veut dire solitude. 

Ne lisez pas de médiocrités. Lisez les œuvres des grands esprits et concourez avec eux. Ou bien instruisez-vous… cultivez votre mémoire. La mémoire est la clef de tout, croyez-moi. 

Ne dites jamais "pour une fois". C’est le commencement des mauvaises routes. 


            JACCOTTET Philippe (né en 1925)

Il faut que le temps m’ensemence. 


                   JANKELEVITCH Vladimir (1903-1985)

Ce qui s’installe sans être éprouvé est comme s’il n’était pas. C’est une naissance à recommencer, un coup pour rien. 


              JOUBERT Joseph (1754-1824)

Il ne faut pas avoir l’esprit plus difficile que le goût, ni le jugement plus sévère que la conscience. 

Le talent a-t-il donc besoin de passions ? Oui, il a besoin de beaucoup de passions réprimées. 

Celui qui a de l’imagination sans érudition a des ailes et n’a pas de pieds. 

Si la prière ne change pas notre destin, elle change nos sentiments, utilité qui n’est pas moindre. 


              JOUHANDEAU Marcel (1888-1979)

La vraie grandeur, c’est de n’exiger rien que de soi-même, sans rien attendre des autres, pas même qu’ils la reconnaissent. 

Beauté, triomphe en moi de ce qui n’est pas moi. 


                         JULIE DE L’ESPINASSE (1732-1776)

Sans doute que j’eusse été sensible au plaisir de voir votre Eloge couronné par l’Académie […]. Mais j’avoue que je sens et que je ressens, trop vivement peut-être, le dégoût que vous avez d’être soumis à des formules inventées par des pédants, pour l’encouragement et la récompense des écoliers.  


JUNG Carl-Gustav (1875-1961)

L’inadaptation relative de l’artiste est son véritable avantage ; elle lui permet de rester éloigné des grandes voies, de suivre sa propre aspiration et de découvrir ce qui manque aux autres, sans qu’ils le sachent.

Tout créateur représente une dualité ou une synthèse de qualités paradoxales. 

De la folie extraire la sagesse, voilà sans doute le comble de l’art. La folie est mère des sages, jamais l’intelligence. 

Ce qu’on ne veut pas savoir de soi-même finit par arriver de l’extérieur comme une fatalité. 

Certes, il est capital de savoir où l’on va, mais tout aussi capitale me semble la question : Qui y va ? 

Dès que l’homme est pris dans la masse, il est au-dessous de son niveau. 

Trop de gens cherchent en dehors d’eux-mêmes ; les uns croient au leurre de la victoire et de la force victorieuse, d’autres aux traités et aux lois ; d’autres encore au renversement de l’ordre établi. En trop petit nombre, quelques-uns cherchent en eux-mêmes, dans leur être psychologique. Cette minorité se demande si la meilleure façon de servir la société et les hommes ne serait pas d’essayer d’abord sur sa propre personne les réformes prêchées à tous les carrefours. 


                    KIERKEGAARD Soren (1813-1855)

Ce n’est pas le chemin qui est difficile, mais le difficile qui est le chemin. 


            KIPLING Rudyard (1865-1936)

Savoir affronter l’échec et le succès, et traiter pareillement ces deux impostures. 


                LA BRUYERE Jean de (1645-1696)

« Il faut faire comme les autres. » Maxime suspecte, qui signifie presque toujours : il faut mal faire… 


                    LACRETELLE Jacques de (1888-1985)

Le chemin de la perfection, si l’on va jusqu’au bout, nous force au silence. 


            LA FONTAINE Jean de (1621-1695)

Creusez, fouillez, bêchez ; ne laissez nulle place

Où la main ne passe et repasse. 


                LAMARTINE Alphonse de (1790-1869)

Toutes les grandes lectures sont une date dans l’existence. 

       

LAO TSEU (-604-479)

Se taire le plus souvent possible. Modérer ses sens. Tempérer ses ardeurs. Ramener chaque chose à sa valeur. Voiler l’éclat dont on rayonne. Etre conscient de son union profonde avec la Nature. Ainsi l’on peut atteindre la parfaite harmonie. 

La noblesse repose sur l’humilité. Ce qui est grand prend appui sur ce qui est infime. 


    LEAUTAUD Paul (1872-1956)

C’est un talent de savoir se passer de ce qu’on n’a pas. 


            LORCA Federico Garcia (1898-1936)

Parfois, quand je vois ce qui se passe dans le mode, je me dis : "A quoi bon écrire ?". Mais il faut travailler, travailler. Travailler et aider celui qui le mérite. Travailler, même si l’on se dit parfois qu’on fournit un effort inutile. Travailler en manière de protestation. 

        

                           MADAME DE STAEL Germaine  (1766-1817)

La gloire, deuil éclatant du bonheur. 


                 MAETERLINCK Maurice (1862-1949)

Nous ne pouvons nous flatter d’avoir compris une vérité que lorsqu’il nous est impossible de n’y pas conformer notre vie. 


            MALRAUX André (1901-1976)

L’art n’est pas une religion. Mais l’artiste créateur obéit à coup sûr à une vocation, qui n’est pas de plaire, et se rapporte fort à la définition que le dictionnaire donne de la foi : « adhésion totale du cœur et de l’esprit. » 

Apprendre à écrire, c’est apprendre à parler avec sa propre voix. 


               MANN Thomas (1875-1955)

S’agissait-il de chômer, de se livrer au repos, de se donner du bon temps, il sentait bientôt une inquiétude et un dégoût qui le ramenaient aux nobles efforts, à la sainte et austère servitude du travail quotidien. 

De la solitude naît l’originalité. 


                MATZNEFF Gabriel (né en 1936)

Pour l’homme moderne, l’esclavage est d’abord celui du bruit, de l’agitation, des nouvelles inutiles, des paroles superflues, de l’ahurissement télévisuel, de tout ce qui contribue au morcellement et à la décomposition de la personne.  


            MARC-AURELE (121-180)

Ne fais jamais rien légèrement et sans y employer toutes les règles de l’art. 

Quoi donc ! sera-ce le désir de la gloire qui te déchirera ? Pense avec quelle rapidité toutes choses tombent dans l’oubli ; remets-toi devant les yeux […] la vanité des acclamations et des applaudissements, l’inconstance et le peu de jugement du peuple qui croit te louer, la petitesse du lieu où se bornent toutes ces louanges. 

Qui aime la gloire place son bonheur dans les émotions d’autrui ; celui qui aime le plaisir, dans ses propres penchants ; l’homme intelligent, dans sa propre conduite. 

Il est parfaitement possible d’être un homme admirable et n’être remarqué de personne. 

Il s’est fait athlète du plus noble combat : ne se laisser abattre par aucune passion. 

La meilleure façon de se venger, c’est de ne pas ressembler à celui qui nous fait injure. 


                MICHAUX Henri (1899-1984)

J’écris pour me parcourir. Peindre, composer, écrire : me parcourir. Là est l’aventure d’être en vie. 

Ne désespérez jamais. Faites infuser davantage. 


                MICHELET Jules (1798-1874)

Nous qui ne produisons pas, nous distinguons avec effort, nous sommes obligés d’y mettre de la critique et de la haine. Si nous étions créateurs, nous n’aurions pas besoin de haine pour séparer et distinguer. Nous nous fierions à notre œuvre ; là où l’œuvre s’arrêterait, la distinction, d’elle-même, arriverait sans effort. Donc, plus on est créateur, plus on produit des êtres caractérisés, distingués par eux-mêmes, moins on fait attention à la distinction, moins on critique, et moins on hait. Les créateurs, les hommes de génie sont capables de critique. Mais ils n’en ont que faire, produisant des œuvres fortement caractérisées, distinguées de toutes autres par elles-mêmes, n’ayant besoin ni de critique, ni de haine, ni de dépréciation pour se mettre à part.


                MIRBEAU Octave (1848-1917)

Ainsi nous en sommes là en ce siècle de la Réclame. Le talent n’est plus rien, l’art ne compte pas, le génie reste à terre, impuissant, rampant tristement sur les moignons de ses ailes coupées, s’il n’est promené à travers les rues par des pitres, affublés de costumes grotesques, comme un queue-rouge. Voilà donc où nous a conduits le journaliste, avec sa camaraderie et ses guichets ouverts à tout, guichets et camaraderie qui font des gens de lettres et des artistes de misérables camelots et transforment la littérature en boutique foraine, sur le devant de laquelle les Bobèches grimacent hideusement, se donnent des soufflets et des coups de pied au derrière pour mieux attirer la foule.


                    MONTAIGNE Michel de (1533-1592)

Entre les arts libéraux, commençons par l’art qui nous rend libres. 

Quand on me contrarie, on éveille mon attention, non pas ma colère ; je m’avance vers celui qui me contredit, qui m’instruit. 


                    MONTHERLANT Henry de (1895-1972)

Jeune homme, je lisais les commentaires de Corneille à son théâtre, les notes de Byron au sien, les préfaces de Dumas fils, plus longues que ses pièces, les préfaces de Strindberg, avant même d’avoir lu leurs pièces, et puis les relisais une seconde fois après avoir lu les pièces. 

Il ne faut pas qu’un artiste s’intéresse trop à son époque, sous peine de faire des œuvres qui n’intéressent que son époque. 

La recherche d’un maximum d’approbation pour un minimum de risques. Quelle belle définition de la bourgeoisie ! 

Sitôt qu’il y a intelligence il y a nuance, et sitôt qu’il y a nuance il n’y a plus de parti.  

Tant de choses ne valent pas d’être dites. Et tant de gens ne valent pas que les autres choses leur soient dites. Cela fait beaucoup de silence. 

         

                                    MONTESQUIEU Charles-Louis de Secondat, baron de (1689-1755)

Les livres anciens sont pour les auteurs, les nouveaux pour les lecteurs. 


MUSIL Robert (1880-1942)

Les deux grandes moitié de la vie sont la métaphore et la vérité. 


        NERVAL Gérard de (1808-1855)

Les illusions tombent l’une après l’autre, comme les écorces d’un fruit, et le fruit, c’est l’expérience. Sa saveur est amère.  


NIETZSCHE Friedrich (1844-1900)


Voilà la chose la plus difficile : fermer par amour la main ouverte et garder la pudeur en donnant. 

Où cesse la solitude, commence la place publique ; et où commence la place publique, commence aussi le bruit des grands comédiens et le bourdonnement des mouches venimeuses. Tout ce qui est grand se passe loin de la place publique et de la gloire. 

Trop vite le solitaire tend la main à celui qu’il rencontre. 

J’ai pitié du vaniteux à cause de sa modestie. C’est de vous qu’il veut apprendre la foi en soi-même ; il se nourrit de vos regards, c’est dans votre main qu’il cueille l’éloge.  

Toujours le SOI écoute et cherche : il compare, soumet, conquiert et détruit. Il règne, et domine aussi le moi. Derrière tes sentiments et tes pensées se tient un maître plus puissant, un sage inconnu – il s’appelle SOI. Il habite ton corps, il est ton corps. – Créer au-dessus de lui-même. Voilà son désir préféré, voilà tout son ardeur. 

Les épreuves morales qui ne nous tuent pas nous grandissent. 

Qu’est ce que la liberté ? C’est d’avoir la volonté d’être responsable de soi-même. De maintenir la distance qui nous isole des autres. 

Tu t’appelles libre ? Je veux que tu me dises ta pensée maîtresse, et non que tu t’es échappé d’un joug. 


        OVIDE (43 av. J.-C – 17)

Jeunes Romains, suivez mes conseils. Livrez-vous à l’étude des Belles-Lettres. 


        PARAIN Brice (1897-1971)

En un sens, on meurt tous très jeunes. Le difficile est de se survivre. 


        PASCAL Blaise (1623-1662)

On ne montre pas sa grandeur pour être à une extrémité, mais en touchant les deux à la fois et en remplissant tout l’entre-deux. 


            PAUWELS Louis (1920-1997)

Cette ascèse vers quoi me renvoie l’apprentissage du langage, m’apprend qu’être libre c’est s’accrocher ferme à la volonté de devenir ce que l’on est. 

Il y a sans doute dans tout homme un enfant qui ne veut pas mourir. Mais il y a dans beaucoup trop d’hommes un adulte qui ne veut pas naître. 

Il n’y a pas de certitudes, mais, au contraire, des doutes de plus en plus vastes. L’élargissement des doutes, c’est cela le paysage, quand on est devenu son propre maître. 

Les portes s’ouvrent de l’intérieur : il faut s’effacer pour passer. 

On ne cherche pas un maître. On le rencontre. Et quand on l’a rencontré, il faut se préparer à le quitter. C’est juste un poteau indicateur à déchiffrer. Seul l’idiot s’enroule autour du poteau indicateur en déclarant qu’il a enfin trouvé son chemin. 

Soyez les hommes du huitième jour, ceux qui, en se créant, poursuivent la Création. 


        PEREC Georges (1936-1982)

Tu as tout à apprendre, tout ce qui ne s’apprend pas : la solitude, l’indifférence, la patience, le silence. 


        PESSOA Fernando (1888-1935)

Pourquoi l’art est-il beau ? Parce qu’il est inutile. Pourquoi la vie est-elle si laide ? Parce qu’elle est un tissu de buts, de desseins et d’intentions. Tous ces chemins sont tracés pour aller d’un point à un autre. Je donnerais beaucoup pour un chemin conduisant d’un lieu d’où personne ne vient, vers un lieu où personne ne va. 


      PORCHIA Antonio (1885-1968)


Je parle avec la pensée que je devrais me taire.

Etre quelqu’un, c’est être quelqu’un de seul. Etre quelqu’un est solitude. 

Ne me donne rien : car tu ne me donnes rien quand je ne te demande rien. 

Tu ne meurs pas de mourir, puisque, de vivre, tu serais déjà mort. 

       

                                PORTO-RICHE Georges de (1849-1930)

Il n’y a que les ratés qui soient bohèmes. Les gens de talent sont presque toujours des réguliers. Le public se trompe en croyant le contraire. 


                            PRÉVOST Jean (1901-1944)

Sans doute, chacun reste unique, comme jamais deux pianistes n’ont joué le même morceau de la même manière. Mais la plupart ne sont originaux que par leurs fautes – au-dessous de l’imitation, et non pas au-dessus. Dire : j’en ferais autant (ou mieux), c’est rester singe, même dans ses prétentions. Il faudrait dire :

— Si  je voulais, je ferais autrement.  


                        PROUST Marcel (1871-1922)

Ce n’est pas l’éducation des enfants, c’est celle des poètes qui se fait à coups de gifles. 


                    RAVEL Maurice (1875-1937)


N’hésitez pas à copier. Si vous avez quelque chose à dire, votre personnalité ne paraîtra jamais mieux que dans les libertés involontaires que vous prendrez avec votre modèle. 


          RENAN Ernest (1823-1892)

L’homme vaut en proportion de sa faculté d’admiration. 


        RENARD Jules (1864-1910)

Nous avons mis dix, quinze ans, à nous former une espèce de goût, et nous nous étonnons que le public n’en ait pas, lui qui n’y pense jamais. 

Dès que je suis seul, c’est-à-dire sans un livre, me voilà médiocre : mon tirant d’eau diminue. 

Prendre des notes, c’est faire des gammes de littérature. 

Que de mal on se donne avant de prendre son originalité chez soi, tout simplement. 

La critique d’un sot te fait mal. Tu t’attristes,

Et tu confonds la gloire avec les journalistes. 

Pleure ! Mais il ne faut pas qu’une seule de tes larmes coule jusqu’au bout de ta plume et se mêle à ton encre. 


          REVERDY Pierre (1889-1960)

A la santé du génie qui marche alors que le talent, pour aller plus vite, n’est capable que de sauter. 

Ce n’est pas tellement de liberté que l’on a besoin, mais de n’être enchaîné que par ce qu’on aime. 

La vie est une chose grave. Il faut gravir. 


            RILKE Rainer-Maria (1875-1926)


Si votre quotidien vous paraît pauvre, ne l’accusez pas. Accusez-vous vous-même de n’être pas assez poète pour appeler à vous ses richesses. 

Les œuvres d’art sont d’une infinie solitude ; rien n’est pire que la critique pour les aborder. Seul l’amour peut les saisir, les garder, être juste envers elles. 

Ne demande à personne de parler de toi, même pas avec dédain. Et si le temps passe et que tu t’aperçois que ton nom circule parmi les hommes, n’en fais pas plus cas que de tout ce que tu trouves dans leur bouche. Pense qu’il est devenu mauvais, et rejette-le. Prends-en un autre, n’importe lequel, pour que Dieu puisse t’appeler en pleine nuit. Et tiens-le secret à tous. 


               RIVIERE Jacques (1886-1925)

Il arrive à un homme, non pas ce qu’il mérite, mais ce qui lui ressemble.  


            RODIN Auguste (1840-1917)

L’on ne peut exercer deux métiers à la fois. Toute l’activité que l’on dépense à acquérir des relations utiles et à jouer un rôle, on le perd pour l’Art. Les intrigants ne sont pas des sots : quand un artiste veut leur faire concurrence, il doit déployer autant d’efforts qu’eux-mêmes, et il ne lui reste presque plus de temps pour travailler. 


                ROLLAND Romain (1866-1944)

L’art est de la vie domptée. 


            ROSTAND Jean (1894-1977)


Je demande à un livre de créer en moi le besoin de ce qu’il m’apporte. 

En général, quand nous obtenons l’estime du public, il y a longtemps que nous et lui avons perdu la nôtre. 

Il faudrait savoir écouter la louange avec l’oreille d’un ennemi. 

Certitude, servitude. 

De deux choses l’une, c’est vraisemblablement une troisième. 

Si tu refuses ton propre combat, on fera de toi le combattant d’une cause qui n’est pas la tienne. 

       

              ROUSSEAU Jean-Jacques (1712-1778)

Pour pouvoir, pour oser dire de grandes vérités, il ne faut pas dépendre de son succès. 


    SAINT AUGUSTIN  (354-430)

Veille sur les préparations, surveille les progrès, accomplis les fruits. 

Avance sur ta route car elle n’existe que par la marche. 


                   SAINT FRANÇOIS DE SALES (1567-1622)

Le bruit ne fait pas de bien. Le bien ne fait pas de bruit. 


                        SAINTE-BEUVE Charles-Augustin (1804-1869)

On ne mûrit jamais ; on durcit par endroits, on pourrit à d’autres. 

Il est un point élevé où l’art, la nature et la morale ne font qu’un et se confondent. 


                            SAINT-EXUPERY Antoine de (1900-1944)

C’est presque un manque de dignité de se donner à tout le monde. 

Il semble que la perfection soit atteinte non quand il n’y a plus rien à ajouter, mais quand il n’y a plus rien à retrancher. 

Prendre conscience, c’est d’abord acquérir un style. 

Dans la vie, il n’y a pas de solutions. Il y a des forces en marche : il faut les créer, et les solutions suivent. 

Une illumination soudaine semble parfois faire bifurquer une destinée. Mais l’illumination n’est que la vision soudaine, par l’Esprit, d’une route lentement préparée. 


                  SARTRE Jean-Paul (1905-1980)

Etre libre, ce n’est point faire ce que l’on veut, mais c’est vouloir ce que l’on peut. 


       SENEQUE (4 av. J.-C. – 65)

Calcule combien de temps t’ont pris créanciers, maîtresses, affaires, querelles conjugales… et aussi les allées et venues à travers la ville pour les mondanités ; ajoute les soucis que l’on s’invente, ajoute encore le temps inemployé : tu verras que tu as moins d’années que tu t’en comptes et que tu meurs avant d’avoir atteint la maturité. 


          SOCRATE (Ve siècle av. J.-C)

Aucune volonté n’est plus grande en moi que celle de ne pas conformer ma vie à vos opinions. Vous pouvez accumuler les critiques : je ne considèrerai pas que vous m’insultez, seulement que vous agissez comme des nouveau-nés. 

              

                 STENDHAL Marie-Henri Beyle dit (1783-1842)

Si vous voulez plaire infiniment aujourd’hui, il faut vous résoudre à être ridicule dans vingt ans. 


SUARES André (1868-1948)


Comme je ne ferai jamais rien pour le public, il ne fera jamais rien pour moi.  

Cette société s’enfonce toujours davantage dans les vases de la niaiserie et les fosses de la violence. Elle a perdu le sens de la loi et de tout ce qui fait vivre. Elle se laisse miner par une tourbe de plaisants et de cyniques. Ce qui se donne pour l’élite de la nation en est l’écume.   



            SWIFT Jonathan (1667-1745)

L’ambition, souvent, fait accepter les fonctions les plus basses ; c’est ainsi que l’on grimpe dans la même posture que l’on rampe. 

La censure est la taxe que paie un homme au public afin de devenir éminent. 


            THIBON Gustave (1903-2001)


Tant d’efforts pour éblouir son prochain et pour n’aboutir en fait qu’à susciter chez les médiocres l’envie et chez les meilleurs la pitié. 

Le jour où tu comprendras que tout le monde a raison à son niveau et dans ses limites, ce jour-là tout le monde te donnera tort. Toutes les portes se ferment devant celui qui est ouvert à tout. N’ayant plus de complices, il n’a que des ennemis. 

Etre dans le vent : une ambition de feuille morte… 

C’est toujours un grand mal que de juger dépassé ce qui est irremplaçable. 

Il ne prie pas vraiment, celui qui demande à la prière ce que les athées demandent à l’action. 

La déception ne doit pas être un mur qui nous renvoie à nous-mêmes, mais un fleuve qu’il faut franchir pour passer du côté temporel au côté éternel des choses. 

Le monde, depuis un siècle, évolue à pas de géant. Tout se précipite : le vent du progrès nous coupe la face. Amer symptôme : l’accélération continue est le propre des chutes plutôt que des ascensions. 


            TOULET Pierre-Jean (1867-1920)

Une théorie d’art aide à la critique, non à la création. 


        TWAIN Marc (1835-1910)

On ne se débarrasse pas d’une habitude en la flanquant par la fenêtre ; il faut lui faire descendre l’escalier marche par marche.  


            VAILLAND Roger (1907-1965)

Quand le langage ne sert plus à donner des ordres ou à décrire, la couleur à camoufler, la maison à habiter, la plante à nourrir, alors commencent le poème, la peinture, le palais et le parc. 


            VALERY Paul (1871-1945)

La précipitation est entrée dans le monde. Elle a tué la postérité. Avec celle-ci un certain "style". Combien d’œuvres modernes racolent, font le trottoir ! 

Il y a un faux "génie" qui se connaît à ceci qu’il ne donne qu’excitation, et non éducation ; excitant, et non aliment.


Qui veut faire de grandes choses doit penser profondément aux détails. 

La véritable tradition dans les grandes choses n’est point de refaire ce que les autres ont fait, mais de retrouver l’esprit qui a fait ces grandes choses et qui en ferait de tout autres en d’autres temps. 

Le besoin de nouveau est signe de fatigue ou de faiblesse d’esprit, qui demande ce qui lui manque. Car il n’est rien qui ne soit nouveau. 

Trouver n’est rien. Le difficile est de s’ajouter ce qu’on trouve. 


            VAN GROOT Hugo (1583-1645)

Qui n’est pas tenté par l’espérance ne craint rien. 


            VIGNY Alfred de (1797-1863)

On n’est jamais en haut. Les forts devant leurs pas

Trouvent un nouveau mont inaperçu d’en bas. 


                VILLIERS DE L’ISLE-ADAM Auguste de (1838-1889)

Nous sommes de ceux qui n’oublient jamais qu’un tonneau vide résonne mieux qu’un tonneau plein. 

D’ailleurs que nous importe la justice ? Celui qui en naissant ne porte pas dans sa poitrine sa propre gloire ne connaîtra jamais la signification de ce mot. 


            VOLKOFF Vladimir (1932-2005)

La Renaissance italienne, cette prodigieuse efflorescence de génies profondément différents les uns des autres, n’avait d’autre doctrine que l’imitation : de la nature, des Anciens, des maîtres, des rivaux. C’est en acceptant un modèle que ces artistes se diversifiaient. Au contraire, en rejetant l’idée de modèle l’art moderne sombre souvent dans les sables mouvants des modes et des influences. Si j’imite volontairement, de toutes mes différences, j’obtiens une œuvre originale ; si je me laisse porter par mes impulsions individuelles, je débouche le plus souvent dans un marécage d’individualités semblables où je m’enlise irrémissiblement. La navigation sans boussole ne mène nulle part ; des manies ne font pas une manière. 


                VOLTAIRE François Marie Arouet dit (1694-1778)

La lecture agrandit l’âme. 

Malheur à qui ne se corrige pas, soi et ses œuvres ! […] Rabote tes vers, si tu en as fait, et ton humeur, si tu en as. 


           WEIL Simone (1909-1943)


Dans le domaine de l’intelligence, la vertu d’humilité n’est pas autre chose que le pouvoir d’attention. 

Dès qu’on a pensé quelque chose, chercher en quel sens le contraire est vrai. 

Toutes les fois qu’on fait vraiment attention, on détruit du mal en soi. 



WILDE Oscar (1854-1900)

En art, les intentions n’ont pas la moindre valeur. Tout le mauvais art est le résultat de bonnes intentions. 

Le public est prodigieusement tolérant, il pardonne tout, sauf le génie. 


        WALLON Jean (1821-1882)

Le sens propre de talent est pièce de monnaie – c’est par figure seulement qu’on l’applique aux facultés de l’homme. 


                        YOURCENAR Marguerite (1903-1987)

Toute vie contient un échec, et la gloire, quand elle vient, ne fait que le constater de plus haut. 


ZWEIG Stephan (1881-1942)


Soyons l’homme qui se cherche en tout et qui cherche tout en soi. 








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Bibliographie succincte aidant à "être soi-même"


Epictète,   Manuel

Cocteau Jean,   La Difficulté d’être

Jung Carl-Gustav,   L’Ame et la vie

Marc-Aurèle,  Pensées à moi-même

Montherlant Henry de,  Carnets

Pauwels Louis,   L’Apprentissage de la sérénité

Pessoa Fernando,   Le Livre de l’Intranquillité

Prévost Jean,   Les Caractères

Rilke Rainer-Maria,   Lettres à un jeune poète

Sénèque,   De la brièveté de la vie

Taine Hippolyte,   Frédéric Thomas Graindorge 


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                                                       RÉSUMÉ

Une anthologie de citations d’artistes sur le moyen de parvenir à être soi-même. Un bréviaire de l’art d’être authentique par ceux qui y sont parvenus. Comment s’obtenir et combattre l’impérialisme des préjugés petits-bourgeois.